Tabou, non ! Ibitavurwa plutôt, c’est ce qu’on aime dire chez nous ! comment avouer que ton propre sang peut abuser de toi ? à qui le dirais-tu ? des fois le silence se trouve être notre seul allié. Ceci est une lettre pour une personne qui me tient à cœur, qui a été meurtri à l’intérieur à un si jeune âge. Ange, tu as mon admiration
Ange, surement que tu vas atterrir sur ces vers un jour. Pas besoin de le signer puisque tu reconnaîtrais ma plume parmi des milliers. Mafuu…à travers ces lignes, tu verras toute mon admiration.
Meuf…je sais que tout d’abord tu vas être en colère parce que j’ai osé écrire ton histoire, depuis que tu m’as raconté ton calvaire, je n’ai pas pu trouver les mots, mais aujourd’hui, j’ose non seulement te le dire publiquement mais j’en profite pour le partager aux autres qui me liront. pardonne moi, je pense que le monde mérite de savoir, le monde mérite de poser un regard nouveau sur tes silences, le monde mérite de te connaitre, du moins de connaitre ton histoire, peut être que ça sauvera certains, certains seront révolté comme je l’ai été cette matinée là où tu m’as raconté ton calvaire, certains diront que c’est pas vrai et certains penseront à leurs enfants loin d’eux, aux obstacles qu’ils pourraient traverser, et certains iront jusqu’à dire : les filles baracreea utu Drama.
Mais moi, je sais que tu es une battante, et j’espère qu’à travers ces quelques vers mélancoliques tu ne revivras pas les abîmes de ton passé, mais que ça te permettra de voir ce que t’as déjà surmonté, à quel point tu es extraordinaire et à quel point je t’aime
Tu rêvais comme on peut rêver à 15 ans…
Tu avais 15 ans, n’est-ce pas ? L’âge ou tu te permets de rêver, et d’ailleurs, tu rêvais comme on peut rêver à cet âge, normal tu ne te doutais pas du malheur qui te guettais. Ton père paix à son âme, était un visionnaire, il voulait voir sa fille fréquenter les bonnes écoles, pour lui, bonne école était synonyme d’école de Bujumbura. Il disait que l’intelligence de sa fille ne pouvait pas rester méconnu au fin fond de la campagne, il avait raison, tu es très intelligente. Bugendana n’est pas si campagne que ça mais pour lui, pour tes rêves (parce que tu rêvais de Bujumbura aussi) tu es descendu, dans cette chaleur qui allait t’étouffer à petit feu.
Tu as été accueilli par ton oncle, tu l’aimais beaucoup, tu disais qu’il avait été le seul à avoir réussi sa vie dans votre famille, et d’ailleurs c’est lui qui payait les frais scolaires de tes petits frères. Tu l’avais pris comme modèle, tu enviait tes cousines et tu rêvais de réussir toi aussi pour venir en aide à ta pauvre mère. Tu ne peux pas t’en vouloir d’avoir cru en lui, C’est très impressionnant de rêver gros comme ça sachant le contexte de notre pays, moi je tire mon chapeau. L’oncle idéal s’est révélé être un bourreau. Je me rappelle tes propres mots et je sens des larmes couler : Aux premiers abords il s’est contenté de simples attouchements en me menaçant de me renvoyer si je faisais la dure, très vite, ces derniers ont laissé place au fruit défendu. Je ne pouvais rien dire puisque c’était lui qui payait tout pour mes petits frères, et puis qu’aurait dit mon père ? qu’aurait-il advenu ? tout comme moi, il idéalisait son frère, j’ai dû j’ai encaissé sans rien dire
En écrivant, je me rappelle tes larmes et je ne peux que compatir, tu n’étais qu’une enfant, ton corps n’était pas prêt, il est d’autant moins aujourd’hui,
Je n’écris pas ça pour te rappeler les détails que tu connais déjà, tu as tant médité en silence, je voudrais que tu saches que t’es une battante, je sais que tu culpabilises, et ça me fend le cœur, je ne vais pas te dire que ça va s’estomper comme ça, mais tu ne devrais pas t’en vouloir, ce n’était pas ta faute, mpore cane
Aux autres qui me lisent, vous l’avez vécu ou bien vous savez celui qui a vécu ça, rappelons-leur à quel point elles n’ont pas mérité ça, ce n’était pas leur faute.