Dans les recoins isolés et oubliés de nos sociétés, vivent des femmes hors du commun, des modèles de courage et de résilience. Souvent invisibles, ces héroïnes du quotidien mènent des combats silencieux pour améliorer la vie de leurs familles et de leurs communautés.
Dans une province du nord du Burundi, plus précisément sur la colline Kavomo à Kirundo, où traditions et croyances continuent de peser lourdement sur les esprits, vit Bedetse, une quinquagénaire.
Mère de trois filles, elle incarne une force tranquille et une résilience admirable face à un préjugé tenace. Dans cette communauté, avoir que des filles est considéré comme une malédiction. Oui, vous avez bien lu, au 21 e siècle, précisément en 2025, il y a encore des gens qui pensent ainsi. Chaque jour, elle endure les commérages et les remarques désobligeantes, certains n’hésitant pas à lui lancer cette phrase blessante :« Ntaco wavyaye ».
Influencé par cette mentalité, son mari l’abandonne. Il part fonder une autre famille, espérant que son épouse lui donnera enfin un fils. Mais Bedetse refuse de se laisser vaincre par le désespoir. Avec courage, elle se bat chaque jour pour offrir une vie digne à ses enfants, prouvant ainsi que sa valeur ne dépend pas des attentes de la société.
La femme qui fait naître l’espoir
Malgré le poids du rejet et des jugements qui l’entourent, Bedetse ne baisse jamais les bras. Elle se bat chaque jour pour offrir une éducation pleine de valeurs à ses trois filles, et affronte les moqueries sans jamais laisser son amour pour elles s’éteindre. Aujourd’hui, voir ses filles grandir et terminer leurs études est pour elle une immense fierté. Avec une émotion palpable, elle confie : « Ntakindi narimfise cokubaha atari urukundo n’umwete wo kubarera. »
Mais Bedetse ne se limite pas à ses succès personnels. Elle sait que la force qu’elle a cultivée au fil des années peut servir d’exemple pour d’autres femmes. Elle commence alors à rassembler les femmes de son village. Les groupes WhatsApp de discussion entre femmes est un luxe pour elles, elles opèrent à l’ancienne, elles se rencontrent, partagent leurs peines, leurs espoirs et leurs rêves. Ces rencontres deviennent un lieu de réconfort, où ces femmes, souvent seules face aux épreuves de la vie, trouvent une écoute attentive et un soutien sincère. Elles partagent comment élever leurs filles et fils dans un monde souvent indifférent à leurs luttes. Elles évoquent les blessures causées par des années de sacrifices invisibles. Ensemble, elles forment une communauté solidaire où les défis sont partagés et les solutions trouvées avec simplicité.
L’union fait la force
Inspirée par son expérience personnelle, Bedetse propose une idée simple mais efficace aux femmes de sa communauté : l’épargne solidaire. Chaque semaine, chacune met de côté une petite somme d’argent, somme qui peut paraître insignifiante à première vue. Pourtant, ces contributions régulières, accumulées au fil du temps, deviennent un levier financier capable de transformer leurs rêves en réalité. C’est ainsi qu’elles parviennent à lancer des initiatives modestes mais porteuses de changement.
Ce qui émerveille Bedetse, ce sont les sourires retrouvés de ces femmes. À travers leurs succès, aussi modestes soient-ils, elle voit la preuve que l’espoir renaît. Ces victoires discrètes, souvent ignorées du reste du monde, remplissent son cœur d’une immense fierté. Elle répète souvent avec conviction : « Une femme qui se tient debout peut en relever dix autres. » Par ses actions, son amour et son dévouement, Bedetse incarne une véritable héroïne de l’ombre. Elle n’a pas besoin de projecteurs pour illuminer la vie de celles qu’elle aide. Ses gestes empreints d’humanité suffisent à éclairer leur chemin vers l’autonomie.
Dans une société comme le Burundi, qui valorise l’homme et ses capacités masculines, chaque femme doit prendre conscience du pouvoir qui est le sien. Elle détient la clé pour transformer ses combats en triomphes, tant pour elle-même que pour les générations futures.